Designer pour l’inclusion

Introduction

Je suis Luz Delgado. Aujourd’hui, je souhaite partager avec vous ma passion pour un domaine qui me tient particulièrement à cœur : le design pour l’inclusion. L’inclusion, à mes yeux, signifie prendre en compte et inclure toutes les spécificités humaines, celles qui nous distinguent les un·es des autres, qu’elles soient physiques, sociales ou psychologiques.

Le concept du design inclusif

Le design inclusif est une méthodologie créative qui valorise la diversité humaine et l’individualité. Cette approche vise à créer des solutions accessibles et utiles pour tout le monde, en considérant un large éventail de capacités humaines dès le début du processus de conception. Elle cherche à éliminer les barrières et créer des expériences intuitives, compréhensibles et confortables quelle que soit la personne.

Ma vision de l’inclusion

Ma perspective sur l’inclusion dépasse la simple accessibilité physique. Elle englobe la prise en compte de toutes les spécificités humaines, incluant les handicaps invisibles comme les neurodivergences et les troubles de santé mentale, les discriminations sociales, les maladies chroniques et les handicaps moteurs et sensoriels. Il est également crucial de reconnaître les situations de vulnérabilité temporaire.

Le design inclusif, dans ma vision, est une approche qui prend en compte la vulnérabilité sous toutes ses formes. En explorant ce concept, j’ai tenté de définir les différentes typologies de vulnérabilités auxquelles nous pouvons être confrontés en tant qu’humains. J’ai identifié plusieurs catégories :

  • Les handicaps invisibles : ces vulnérabilités incluent des particularités telles que les neurodivergences, les troubles de santé mentale ou psychiques. Des conditions comme le TDAH (trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), le trouble anxieux ou la dyslexie peuvent impacter considérablement la manière dont les individus interagissent avec un produit ou un service.
  • Les discriminations ou situations discriminantes : dans certaines expériences, des individus peuvent être exclus en raison de la couleur de leur peau, de leur orientation sexuelle, de leur genre ou simplement parce qu’ils ne parlent pas une langue donnée. Nous partons souvent d’un principe normatif de la société, oubliant que nous vivons dans un monde culturellement diversifié.
  • Les maladies chroniques : ces situations, souvent considérées uniquement dans le contexte de la santé, ont un impact sur la façon dont une personne interagit avec le monde. La douleur chronique, l’asthme ou le cancer, par exemple, influencent profondément l’expérience quotidienne des individus.
  • Les handicaps moteurs et sensoriels : être en situation de handicap moteur, dans un fauteuil roulant ou être aveugle, par exemple, a également un impact significatif.
  • Les situations de vulnérabilité temporaire : des événements comme un accident ou une grossesse peuvent changer radicalement la façon dont nous interagissons avec les produits et services.

Reconnaître ces différentes formes de vulnérabilité est essentiel pour aller au-delà dans la définition de notre cible et dans notre travail sur les utilisateurices. Cependant, reconnaître ces aspects ne suffit pas ; il est également nécessaire de les prendre en compte dans tous les processus de conception.

Mon déclic pour m’intéresser au design inclusif

Mon immersion de six mois dans un hôpital psychiatrique m’a profondément sensibilisée à l’importance de considérer la vulnérabilité dans le design. Cet environnement a renforcé ma compréhension de l’empathie et de la nécessité de rencontrer et comprendre les personnes souffrant de troubles psychiques pour améliorer leur expérience.

Intégrer l’inclusion dans le design

Phase de recherche

La recherche est la première étape essentielle dans le processus de conception inclusive. Il est crucial d’intégrer dans nos panels des personnes issues de divers horizons et de ne pas se limiter à la parité hommes/femmes. Nous devons considérer les personnes transgenres, non binaires et d’autres qui sont souvent négligées comme étant en dehors de notre cible.

Il est important d’aller au-delà des critères démographiques classiques pour comprendre les particularités de notre cible. En cartographiant notre public, nous devons imaginer des personas qui possèdent diverses couches de vulnérabilité. Nos utilisateurices ne sont pas des caricatures ; ce sont des êtres humains vulnérables auxquels nous devons accorder une attention particulière.

Phase de conception

Dans cette phase, il est essentiel de construire des parcours utilisateurs qui prennent en compte ces vulnérabilités. Nous devons nous interroger sur les problématiques supplémentaires que peuvent rencontrer les personnes vivant avec ces vulnérabilités. Il faut prendre conscience que ces particularités ne sont pas isolées et qu’une personne peut être vulnérable à différents niveaux dans sa vie.

Une bonne pratique consiste à co-designer avec les personnes concernées. Cela permet de les impliquer directement, de comprendre leur point de vue et d’éviter de faire des suppositions.

Phase de tests

Enfin, pour la phase de tests, il est essentiel d’adopter une approche similaire à celle de la recherche. Nous devons tester nos conceptions avec des personnes concernées et éviter d’avoir des critères normatifs dans le choix de nos panels. Cela garantit que nos produits et services sont véritablement inclusifs et répondent aux besoins d’une gamme plus large d’utilisateurices.

L’atelier « Tous ensemble » pour la sensibilisation à l’inclusion

Un groupe de personnes debout autour d'une table sur laquelle sont disposés une grande feuille avec des post-its, crayons et feuilles de papier. Six personnes assises autour du table où est posée une grande feuille avec des lignes et colonnes ; elle parlent entre elles.

Depuis l’été dernier je travaille sur un projet de sensibilisation aux vulnérabilités et au design inclusif grâce à un atelier. J’ai eu l’opportunité d’animer cet atelier en septembre à Paris Web. Depuis, j’adopte une démarche de co-design avec les participant·es pour déterminer leurs besoins spécifiques en matière de prise en compte des vulnérabilités.

L’objectif principal de l’atelier a été d’aborder des sujets allant au-delà du handicap visible. Nous avons commencé par explorer les neurodivergences, notamment le TDAH, et les questions de santé mentale telles que le trouble anxieux.

L’atelier débute par un icebreaker en petits groupes, favorisant le partage d’anecdotes personnelles liées au handicap ou aux discriminations vécues au travail, avec des proches ou par eux-mêmes. Cette approche initie doucement la discussion sur des sujets sensibles et crée un espace sécurisé pour les aborder.

Par la suite, les participant·es découvrent une carte thématique de vulnérabilité pour mieux comprendre la situation et les problèmes principaux. Ils entrent en empathie avec les personnes concernées grâce à des verbatims et reçoivent des conseils pour la conception.

Les participant·es sont ensuite amené·es à travailler sur un parcours spécifique, tel que le voyage en train ou la recherche d’emploi, pour se projeter dans les expériences d’autrui. L’idée est de partir de situations connues pour mieux imaginer les défis rencontrés par les personnes concernées.

Le but initial de l’atelier est de sensibiliser les participant·es à l’existence de ces situations, de leur faire comprendre qu’elles touchent notre public cible et qu’il est pertinent d’aller au-delà des suppositions en impliquant des personnes directement concernées dans la recherche.

Dans la phase finale, les équipes élaborent des solutions, se rendant compte que le design inclusif n’est pas forcément plus coûteux et peut bénéficier à un plus grand nombre. Un partage final permet de cristalliser les découvertes et de conclure avec des pistes concrètes pour progresser dans ce domaine.

Jusqu’à présent, nous avons exploré avec les participant·es quatre thèmes : le TDAH, le trouble anxieux, la transphobie et l’illectronisme.

Retours des participant·es sur l’atelier « Tous ensemble »

L’atelier a suscité des retours extrêmement positifs de la part des participant·es, qui ont apprécié divers aspects de l’expérience :

❤️ Ce qu’ils ont aimé de l’atelier :

  • Le travail sur les handicaps invisibles a permis aux participant·es de se mettre à la place des personnes concernées, créant une prise de conscience significative.
  • Diversité et inclusivité : l’accent mis sur la diversité des idées, l’inclusivité dans la conception et la prise en compte de l’expérience utilisateur pour des publics souvent négligés a été très apprécié.
  • Découverte et réflexion : la découverte de nouvelles thématiques et la réflexion sur des problématiques méconnues ont élargi les horizons des participant·es.
  • Pratique et application : l’expérience pratique avec des cas concrets d’application du design inclusif a été jugée concluante et intéressante.

‍Ce que les participant·es ont appris :

  • Beaucoup ont acquis une meilleure compréhension des caractéristiques de ces troubles, en reconnaissant leur prévalence et leur impact sur la vie quotidienne.
  • Importance des solutions inclusives : les participant·es ont confirmé que les solutions inclusives profitent à tous et toutes et ont pris conscience de la nécessité de les intégrer dans leurs pratiques.
  • L’atelier a sensibilisé sur les handicaps invisibles, comme le TDAH et les troubles anxieux, en montrant comment ils affectent les interactions des personnes avec les produits et services.
  • Les participants ont vécu des expériences empathiques leur permettant de se mettre à la place des personnes en situation de handicap.
  • L’atelier a permis de mieux comprendre l’illectronisme et ses impacts, en offrant des perspectives sur la manière de l’aborder dans le design.
  • Les retours ont mis en évidence la nécessité de penser aux impacts pour les personnes les plus vulnérables et d’adopter une démarche inclusive dans la recherche et la conception.
  • Les participant·es ont découvert des difficultés systémiques qui doivent être solutionnées par la société dans son ensemble, au-delà des actions individuelles.
  • L’atelier a permis d’ouvrir la perception des participant·es sur les défis spécifiques rencontrés par les personnes transgenres, en particulier dans des situations comme le parcours de recrutement.

Conclusion

Le design inclusif est un voyage vers une compréhension enrichie de l’humanité dans sa diversité. Il est crucial de dépasser les apparences et d’embrasser toutes les facettes de la diversité humaine. Je vous encourage à poursuivre votre intérêt pour les thématiques du handicap, à collaborer avec des associations, à rechercher activement des informations et à intégrer des utilisateurices en situation de handicap dans vos processus de conception.

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