Immersion dans la jungle des buzzwords éco-conçus

Au détour de la veille que notre activité de créateurs de services numériques et faiseurs du web nous impose, nous avons tous et toutes lu ou entendu les termes « sobriété numérique », « numérique responsable », « sustainable » « éco-responsable », « éco-conception », « éco-conçus », « écodesign », « green UX », « green IT », « design circulaire », « régénératif », « systémique » et j’en passe des vertes (petit jeu de mots) et des pas mûres… Mais alors comment faire pour s’y retrouver dans cette jungle des mots à la pointe de la mode du green ? Cet article vous propose de faire un petit tour d’horizon de ce que j’ai pu récolter lors de ma veille et de mon quotidien en tant que Designer. Partons donc à la conquête d’un petit lexique « éthique » qui vous permettra, je l’espère, d’y voir un peu plus clair.

Prenons un peu de hauteur

Quel est le contexte actuellement ? En tant que designers, développeurs, développeuses, ingénieur·es, le champ des possibles et des évolutions sur nos métiers est de plus en plus vaste. Mais est-ce que le terme « vaste » rime réellement avec celui « d’illimité » ? En créant, concevant et en développant le numérique de demain, nous avons peut-être trop souvent pensé que « l’expérience utilisateur » se jouait aux limites humaines…

Nous prenons aujourd’hui de plus en plus conscience de nos impacts sur la planète et de ses limites. À ce jour les « expériences utilisateurs » que nous explorons et mettons en place permettent de défendre des solutions numériques toujours plus utiles, utilisables et désirables en oubliant trop souvent d’intégrer celles-ci dans notre environnement planétaire. Alors comment faire aujourd’hui, pour trouver le juste équilibre dans cette équation durable : People, Planet et Profit ?

Place au collectif pour agir ensemble

Qu’importent les raisons qui nous poussent à passer à l’action, nous sommes toutes et tous parties prenantes des choix de conception qui impactent nos écosystèmes au sens large. Nous devons donc, au-delà de créer des solutions utiles, utilisables et désirables, intégrer la notion de durabilité et de responsabilité ! Pour atteindre ces deux nouvelles notions dans une démarche de performance globale, je suis donc partie à la recherche de méthodes, outils, formations, lectures et rencontres (coucou Frédéric Bordage) pour m’éclairer sur le sujet.
Une multitude de termes se sont donc présentés à moi, plus ou moins connus à mes yeux en tant que Designer plus responsable et engagée ! Dès lors, j’ai observé un véritable feu d’artifices des mots les plus Green les uns que les autres : « numérique responsable », « éco-responsable », « éco-conception », « éco-conçus », « écodesign », « green UX », « green IT » etc.

Mais comment différencier tous ces termes les uns des autres ? Comment éviter de se retrouver noyé avec ce nouveau vocabulaire faisant désormais partie de notre quotidien de Designer « éco-concepteur » en herbe ?

Partons à la conquête d’un lexique green et éthique

Amélie Poirier sur LinkedIn Commençons par le tout début et le plus connu, je veux parler bien entendu de « sobriété numérique ». C’est l’un des termes les plus utilisés en ce moment, sur le Web et dans les médias. Effectivement il s’agit d’une démarche qui consiste à concevoir des services numériques plus sobres et à modérer ses usages numériques quotidiens. Cette démarche est globale et transversale et doit pouvoir s’appliquer à l’ensemble des services numériques d’une organisation dans le but d’être mesurable et mesurée. La sobriété numérique a pour objectif de faire changer les usages au global, de réduire l’empreinte carbone et la consommation énergétique. À ne pas confondre avec la démarche « low-tech » qui cherche à rendre un service avec un usage minimal des technologies numériques, voir même sans aucune technologie.

Du numérique responsable à l’éco-conception

Le second très en vogue est celui de « numérique responsable ». Ici il s’agit d’un label qui a pour but de réduire l’impact du numérique dans une démarche d’amélioration continue. Celle-ci vise à réduire l’empreinte écologique économique et sociale des technologies de l’information et de la communication. Ce label permet de soutenir les trois piliers forts du développement durable à savoir : People, Planet et Profit.
Niji
L’équipe Niji sur la partie Digital Design Agency à Rennes

L’éco-conception de produits et de services

Arrive ensuite l’appellation « d’éco-conception (au sens large) de produits et de services ». C’est également l’un des termes le plus utilisé et entendu, trop souvent confondu avec celui de sobriété numérique. Pour définir celui-ci, commençons par un petit rappel, à savoir que l’éco-conception n’est pas une nouvelle méthode de conception, mais « simplement » l’intégration de l’environnement dans les méthodes classiques de conception. Ce terme fut initié dans les années 1990 pour intégrer les aspects environnementaux dès les phases de design et de développement de produits et de services et ce tout au long de leur cycle de vie. Cette approche globale et multicritères est d’ailleurs encadrée par la norme ISO/TR 14062, principalement destinée à la conception et au développement de produits. L’idée générale étant de mettre en place un processus basé sur l’amélioration continue et le retour d’expérience.

L’éco-conception web

Viens ensuite « l’éco-conception web ». Ici l’idée est d’appliquer les grands principes de l’éco-conception numérique pour réduire l’impact environnemental, d’ailleurs il existe aujourd’hui de nombreux guides et ouvrages qui indiquent les bonnes pratiques en fonction de notre métier.

En résumé, éco-concevoir un site web, à niveau de qualité et de service constant, consiste à réduire la quantité de moyens informatiques et télécoms nécessaires. Contrairement à une démarche traditionnelle d’optimisation des performances qui relève de l’efficacité (objectif/résultat), l’éco-conception est une démarche d’efficience (équilibre entre les résultats et les moyens). Elle vise à dépenser le moins possible de ressources pour atteindre un objectif. Il est en effet facile d’obtenir des performances élevées (par exemple un temps de réponse court) par une débauche de moyens : multiplication du nombre de serveurs ou de quantité de mémoire vive par exemple. Mais ces moyens ont un coût écologique et économique considérables.

Le Green IT

Je vous propose maintenant d’aborder le « green IT ». Celui-ci vise à réduire la pollution numérique générée par les systèmes d’informations, en définitive, le « green IT » a pour objectif de limiter la consommation d’énergie, de gaz à effet de serre et de démocratiser les pratiques éco-responsables.

Design circulaire, systémique et régénératif

Viennent ensuite toutes les notions autour du « Design » qu’elles soient circulaires, systémique ou régénérative, chacune d’entre elles a un rôle bien précis à jouer.

Design circulaire

Commençons par le « design circulaire ». Il s’agit d’une démarche née en 2017 de la collaboration entre IDEO et la Fondation Ellen MacArthur pour appliquer le Design Thinking à l’Économie Circulaire, en considérant les besoins et priorités de la planète au même titre que ceux des êtres humains.

Design systémique

Continuons ce petit tour d’horizon avec deux termes un peu plus complexes dans l’explication, tout d’abord le « design systémique » qui permet d’avoir une approche de conception basée sur la compréhension globale des systèmes (économique, politique, sociale, comportemental et environnemental) dans sa totalité, complexité et dynamique. C’est une démarche non linéaire qui fonctionne par complémentarité. Avec cette démarche on ne parle plus de design centré utilisateur mais de design centré sur les systèmes. Aujourd’hui cette méthode sert dans une démarche d’éco-conception mais les deux ne sont pas équivalents.

Design régénératif

Dans la même veine on peut également entendre parler de « design régénératif » ; celui-ci est lié à la pensée systémique. Le design régénératif permet de construire et de faire évoluer la créativité et l’innovation tout en favorisant le développement de la diversité au lieu de la détruire. En d’autres termes cela revient à faire générer des actions qui seront utiles et bénéfiques pour l’organisme, la dimension écologique et tous les systèmes que l’on impacte.

Pour clôturer ce lexique, jetons un œil à la signification de deux termes incontournables et iconiques !

Le Cycle de vie

Il est très utilisé en éco-conception et en design circulaire puisqu’il s’agit de décrire les grandes étapes d’un produit ou d’un service. Depuis plus de 30 ans il s’articule toujours de la même manière ; premièrement je conçois, ensuite j’extrais les matières premières, je fabrique, je transporte, j’utilise et enfin je trie ou je recycle sinon c’est la fin de vie. Celui-ci permet de visualiser tous les impacts de mon produit tout au long de son cycle de vie.

Le Cycle de vie de service numérique

Ici on ne considère plus un produit, mais les services numériques que nous concevons chaque jour. Ce cycle de vie de service numérique débute par la conception d’un site web ou d’un logiciel, vient ensuite la réalisation, puis le développement, l’utilisation, la maintenance et enfin la gestion de sa fin de vie.

Au-delà de cet enchainement d’étapes, ce cycle nous amène à nous poser trois questions : quelle est l’unité fonctionnelle principale de mon service numérique ? Quels sont les terminaux utilisés afin d’éviter des problématiques d’obsolescence ? Comment mon modèle économique apporte de la valeur au service qui le propose et à l’ensemble de l’écosystème qui l’entoure ?

La boucle est bouclée

Voilà ! Nous avons fait le tour des termes incontournables dans le domaine du « green » ! En espérant que ce petit lexique vous donnera un peu plus de visibilité sur les enjeux et les solutions d’aujourd’hui et de demain pour mettre en place des services numérique durables. Et n’oubliez pas que face à l’urgence climatique, nous n’avons plus le choix, nous devons, individuellement ou collectivement, intégrer ces pratiques au maximum dans nos vies quotidiennes et notre pratique du métier.

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